Évaluer l'activité qui fait sens
EN SALLE D'OPÉRATION
Et en situation de crise
L'erreur est humaine, mais…
En 1999, l’Institute of Medicine (IOM) a publié un rapport intitulé « To Err Is Human » dans lequel l’erreur médicale était citée comme la huitième cause de décès aux États-Unis (plus que les accidents de la route, le cancer du sein ou le SIDA), responsable de 98 000 décès par an (1). Le milieu de la santé commençait à prendre conscience de l’importance des facteurs organisationnels et humains.
En France, le ministère de la Santé a mené une enquête nationale sur les « événements graves non désirés liés à la prestation des soins de santé en 2004 et 2009 ». On a constaté que dans les hôpitaux, 60 % de ces événements pourraient être liés à un mauvais travail d’équipe, notamment à « une supervision insuffisante, une communication insuffisante et un manque de culture de la qualité » (2).
Depuis, de nombreuses études se sont penchées sur les compétences non techniques des soignants et ont montré, comme dans les études françaises, qu’une mauvaise communication et une mauvaise supervision étaient des caractéristiques générales fréquentes. Progressivement, on a également mis en évidence d’autres traits tels que le manque de vigilance, des degrés d’attention variables, de faibles compétences en gestion du stress, un leadership inapproprié et un mauvais travail d’équipe (3-6).
Description du projet
Les compétences non techniques sont particulièrement cruciales dans des situations mal définies, évoluant rapidement et lorsque les enjeux sont élevés. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un patient en salle d’opération commence à se désaturer, sans raison apparente, et que les premières actions de remédiation ne montrent aucune amélioration. L’anesthésiste, le chirurgien et les infirmières doivent alors partager leurs perceptions de la situation, proposer des interprétations, sélectionner les plus plausibles et agir avant qu’il ne soit trop tard. En d’autres termes, le personnel doit répondre aux questions « Que se passe-t-il ? » et « Que devrions-nous faire à ce sujet ? ». Une crise au bloc opératoire est avant tout une question de sens. Le problème a rarement été vu et analysé dans le cadre conceptuel de la création de sens (7).
Le but ultime de notre programme de recherche auquel cette étude contribue est de créer des conditions opérationnelles appropriées à une création de sens efficace et de former le personnel de salle d’opération à ces processus.
Ce programme de recherche a débuté en 2020 et est mené avec le service d’anesthésiologie et de réanimation de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre.
AUTEURS CITÉS
1. IOM. Institute of Medicine. To Err Is Human : Building a Safer Health System. In: To Err Is Human: Building a Safer Health System. ; 1999.
2. Michel P, Minodier C, Lathelize M, et al. Enquête nationale sur les événements indesirables associés aux soins observés dans les établissements de santé. Dossiers Solidar santé. 2010;17.
3. Sutcliffe KM, Lewton E, Rosenthal MM. Communication Failures : An Insidious Contributor to Medical Mishaps. Acad Med. 2004;79(2):186-194.
4. Fletcher GCL, McGeorge P, Flin RH, Glavin RJ, Maran NJ. The role of non-technical skills in anesthesia : A review of current literature. Br J Anaesth. 2002;88(3):418-429. doi:10.1093/bja/88.3.418
5. Mazzocco K, Petitti DB, Fong KT, et al. Surgical team behaviors and patient outcomes. Am J Surg. 2009;197(5):678-685. doi:10.1016/j.amjsurg.2008.03.002
6. Vogus TJ, Sutcliffe KM, Weick KE. Enabling, Enacting, and Elaborating a Culture of Safety in Health Care Executive Overview, Acad Manag Perspect. 2010:60-77.