VÉCUS ET PRATIQUES AUTOUR DE L’ACCOUCHEMENT

Journée d’étude du mardi 18 juin 2024 à LYON

Le contexte

Après une phase de sta­bi­li­sa­tion des tech­niques obs­té­tri­cales sécu­ri­sant l’accouchement (1980 – 2010), on s’intéresse fina­le­ment depuis peu de temps à ce que vivent les femmes… pour s’apercevoir que cette expé­rience est sou­vent en déca­lage avec leurs attentes, et vécue comme source de frus­tra­tion, voire comme une dépos­ses­sion1. En effet, la pré­va­lence des expé­riences néga­tives ou accou­che­ments vécus comme trau­ma­tiques s’élève de 20% à 45% selon les études2. Du fait de la per­méa­bi­li­té psy­chique par­ti­cu­lière aux étapes péri­na­tales, les res­sen­tis néga­tifs laissent une empreinte pro­fonde3 : dépres­sion du post-par­tum, anxié­té, trouble de la rela­tion mère-enfant, dif­fi­cul­tés au sein du couple, peur, culpa­bi­li­té, honte, voire état de stress post-traumatique.

La com­mis­sion des 1000 pre­miers jours, réunis­sant à la demande du gou­ver­ne­ment fran­çais 18 experts en péri­na­ta­li­té, recon­naît dans son rap­port de 2020 que le vécu de l’accouchement est un « enjeu majeur de san­té publique »4. Mais si les poli­tiques publiques inves­tissent l’avant accou­che­ment et main­te­nant le post-par­tum, la salle de nais­sance reste une boîte noire dont seule la méde­cine serait la ges­tion­naire. Tout se passe comme si la salle de nais­sance n’était qu’un (mau­vais ?) moment à pas­ser, une sorte d’antichambre de l’arrivée du bébé. Or ce moment est consti­tué de nom­breuses dimen­sions non stric­te­ment médi­cales : un pas­sage vers le sta­tut mater­nel, une affir­ma­tion de sa capa­ci­té mater­nelle, une sépa­ra­tion d’avec le bébé-fœtus, l’attachement à son enfant, le regard du co-parent, le gou­ver­ne­ment des corps, et plus lar­ge­ment l’effectuation du sys­tème social et poli­tique en ce qu’il défi­nit le rôle de la mère, etc3 – 10. Toutes les dimen­sions de la nais­sance psy­cho­lo­giques, socio­lo­giques, poli­tiques, éco­no­miques, phi­lo­so­phiques… doivent donc être dépliées afin d’accompagner les femmes, et plus lar­ge­ment les co-parents dans leur che­mi­ne­ment.
Observant que les tra­vaux plu­ri­dis­ci­pli­naires sont peu nom­breux sur le sujet, nous orga­ni­sons une jour­née d’étude sur le vécu et les pra­tiques autour de la nais­sance. Cette jour­née s’adresse aux cher­cheurs, pro­fes­sion­nels en péri­na­ta­li­té, asso­cia­tions et plus lar­ge­ment toutes les per­sonnes inté­res­sées par ce sujet. Elle est conçue comme une ren­contre durant laquelle seront pré­sen­tées des études ou expé­riences de nou­velles pra­tiques, et qui ser­vi­ront de base à toutes les formes d’échanges.

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Références

  1. Charrier, P. Diversification des lieux de nais­sance en France : le cas des Maisons de nais­sance. Rech. Fam. 12, 71 – 83 (2015).
  2. Chabbert, M. Le vécu de l’accouchement chez la femme : éva­lua­tion cli­nique, étude des fac­teurs de risque et de pro­tec­tion, et des consé­quences sur l’état psy­cho­lo­gique mater­nel, la rela­tion conju­gale et la rela­tion mère-bébé. (Université de Paris, 2020).
  3. Molénat, F. Accompagnement et alliance en cours de gros­sesse. Yapaka 59 (2012).
  4. Cyrulnik, B., Benachi, A. & Filliozat, I. Rapport de la com­mis­sion des 1000 pre­miers jours. Ministère des Solidarités et de la Santé 2 – 130 (2020).
  5. Schantz, C., Lhotte, M. & Pantelias, A. C. Moving beyond the ethi­cal ten­sion of cae­sa­rean sec­tion on mater­nal request. Sante Publique (Paris). 32, 497 – 505 (2020).
  6. Spiess, M. Donner nais­sance : une confron­ta­tion à l’altérité. Dialogue Can. Philos. Assoc. 184, 105 – 113 (2009).
  7. Poizat, A. Quels rites pour les mater­ni­tés aujourd’hui ? « Rev. psy­cho­thé­ra­pie Psychanal. groupe » 1, 127 to 133 (2003).
  8. Fassin, D. & Memmi, D. Le gou­ver­ne­ment des corps. (EHESS, 2004).
  9. Cascales, B. & Négrié, L. L’accouchement, une ques­tion cli­vante pour les mou­ve­ments fémi­nistes ? Trav. Genre Soc. 39, 179 – 185 (2018).
  10. Simonds, Wendy. 2002. “Watching the Clock : Keeping Time during Pregnancy, Birth, and Postpartum Experiences.” Social Science and Medicine 55(4): 559 – 70.

Informations pratiques

Affiche pour la journée d'étude sur l'accouchement

En savoir plus sur les organisateurs

À la demande de la mater­ni­té de Poissy-Saint Germain (78), des cher­cheurs issus d’institutions et de dis­ci­plines variées se sont regrou­pés au sein de l’association « L’humain au cœur du soin » pour conduire un pro­jet de recherche (inti­tu­lé Gaïa) por­tant sur le vécu de l’accouchement.

En savoir plus…

Programme du 18 juin 2024

8 H 15 café d’accueil

8 h 45 – 9 h

Introduction des organisateurs

9 h – 9 h 45

Le vécu de l’ac­cou­che­ment au prisme de la sin­gu­la­ri­té du vivant, Renaud Vidal, coor­di­na­teur Projet Gaia, UC Berkeley CCRM

9 h 45 – 10 h 30

Accouchement, un pas­sage trans­for­ma­tion­nel, Elsa Lecoq et Camille de Bovis, Laboratoire Magellan, Lyon 3

10 h 30 – 11 h 45

Comment se construisent les sub­jec­ti­vi­tés des par­tu­rientes : entre dis­cours médi­cal et dis­cours non ins­ti­tu­tion­nels (Table ronde)

  • « Dire son accou­che­ment – le rap­port au per­son­nel soi­gnant », Louise Behe et Noémie Genty, CRAL, EHESS
  • « Les vio­lences obs­té­tri­cales : entendre le vécu d’accouchement en milieu médi­ca­li­sé », Claire Michel, CRPMS, Université Paris Cité
  • « Analyse lin­guis­tique des récits d’accouchement : appro­pria­tion sub­jec­tive et com­mu­nau­té de dis­cours », Charlotte Danino, PRISMES, Université Sorbonne Nouvelle

Animation : Camille de Bovis, Laboratoire Magellan, Lyon 3

11 h 45 – 12 h 30

Rendre visible l’ac­cou­che­ment grâce à la pho­to­gra­phie,

Orsolya Elek, Coralie Castillo, Marie Landoin, Debohra Saba, pho­to­graphes du Collectif Carmin

12 H 30 – 14 H : repas

14 h – 14 h 45

« Évaluer le vécu de l’ac­cou­che­ment », Renaud Vidal, coor­di­na­teur Projet Gaia, UC Berkeley CCRM et Maud Benetreau, LIS, Université de Paris-Est-Créteil

14 h 45 – 15 h 30

« À la recherche du vécu de l’accouchement », Philippe Charrier, Centre Nantais de Sociologie, Nantes Université

15 h 30 – 17 h 30

Transformer les pra­tiques (World café)
Chaque inter­ve­nant dis­pose de 15 min de pré­sen­ta­tion en séance plé­nière. Les par­ti­ci­pants se scindent ensuite en quatre groupes. Chaque groupe dis­cu­te­ra suc­ces­si­ve­ment avec un inter­ve­nant pour appro­fon­dir les aspects qui l’intéressent plus particulièrement.

  • « Regards croi­sés sur les pra­tiques visant à tra­vailler le vécu d’accouchement dans une mater­ni­té de Suisse Romande », Clara Blanc, Institut des études genre, Université de Genève, Haute école de san­té Vaud, HES SO et Maxime Haubry, Département de gyné­co­lo­gie obs­té­trique, Réseau hos­pi­ta­lier neuchâtelois
  • « Vécu trau­ma­tique de l’ac­cou­che­ment : entre idéa­li­sa­tion de la nais­sance et sécu­ri­sa­tion des soins, quels outils pour les soi­gnants ? », Jocelyne Clutier, sage-femme cadre, CHU de Montpellier
  • « Votre accou­che­ment, par­lons-en ! L’Entretien de Vécu d’Accouchement (EVA) au CHUV à Lausanne », Valentine Annen, sage-femme, mater­ni­té du CHUV de Lausanne
  • « Sauveurs, menaces, ou alliés ? Le rôle des méde­cins et des sages-femmes en muta­tion : l’im­por­tance du par­te­na­riat avec les mères et du res­pect du prin­cipe de consen­te­ment dans la nais­sance aujourd’­hui, Lolita Samama et Claire Rayappa, sages-femmes libé­rales et membres de l’Association Professionnelle de l’Accouchement Accompagné à Domicile 

17 h 30 – 17 h 45

Dernières ques­tions et pro­pos conclusifs

17 h 45 – fin de la journée d’étude

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